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La légende d'Orgus


Un ciel dégagé de tout nuage ravit les habitants d’un hameau nommé Orgus. Une légende dit que de l’or pourrait y être caché. Ce nom peu ordinaire est celui d’un Dieu qui a le pouvoir de faire jaillir de ses yeux de petites pierres précieuses d’une brillance et d’une blancheur à faire pâlir tous ceux qui y croient. Ceux-là n’ont eu qu’une hâte, celle de prospecter, de trouver Orgus, par tous les temps. Les résidents environnants se sont retrouvés dans ce hameau où, tout en haut d’une colline, tout près d’un arbre sur lequel le nom d’Orgus a été gravé, a vécu dans une cabane, ce fameux Dieu qui pleurait des larmes cristallines. Aucun meuble n’a jamais garni ce lieu. A l’extérieur, les habitants à coups de pelles et de râteaux ont saccagé le sol terreux, laissant des trous de largeurs plus ou moins grandes et profondes. Leurs multiples recherches ont été vaines. La plupart d’entre eux se sont résignés. Le trésor n’a pas existé. Il n’aurait été alors qu’une légende !


Au-delà de la route de campagne, bordée de chaque côté par des champs de lavande qui appellent le regard émerveillé des touristes, les pluies diluviennes et les rayons de soleil de ces dernières semaines ont épanoui les cultures. Quelques kilomètres après, un panneau, des dos-d’âne et des feux tricolores indiquent l’entrée de la ville. De hauts bâtiments en pierres et d’autres en acier avec de grandes baies vitrées témoignent du contraste entre l’architecture ancienne et moderne. Des passants se déplacent les mains chargées de paquets. D’autres sont attablés à la terrasse d’un café. Un peu plus loin, une femme pousse un landau, un homme avance à pas rapides en tenue de sport, portant un jogging et des baskets. Des conducteurs impatients klaxonnent pour essayer de faire réagir celui ou celle qui semble s’endormir devant le feu rouge passé au vert.

Après avoir franchi de nombreux feux tricolores, autres intersections et ronds-points, juste avant la sortie de la ville, en bordure de route, à droite, on peut apercevoir une boîte aux lettres. Un chemin de terre chaotique, un dernier virage et la voici, la maison en pierres avec son grand portail en fer forgé. De chaque côté de celui-ci, une tête de lion en bronze fait face aux visiteurs. A travers les barreaux, une belle allée de graviers, bordée de chaque côté de rangées de fleurs colorées, jaune, orange, bleu, attire le regard et donne envie de s’y introduire.

Au fond de l’allée, debout devant l’entrée un homme d’une soixante d’années fume une cigarette. Il est assez grand, mince et vêtu d’une chemise bleue et d’un jean. Il est nerveux et préoccupé. Le tabac semble le calmer.

A l’intérieur, dans le salon, à droite, un grand placard en bois d’acajou, et à gauche, une armoire vitrée dans laquelle sont exposées sur des tablettes en verre, des statuettes en bronze, un bouddha. Une dizaine de pierres en cristal, de taille différente et de couleurs violettes, argentées, noires, vertes, ornent la vitrine ainsi que des objets de décoration. Face à l’entrée, sur un petit bahut est posé un téléviseur. Au centre, sur un canapé en cuir noir est affalée Laetitia, une adolescente âgée de quinze ans. Elle est en conversation téléphonique avec son copain Paul. Elle s’exprime doucement. Ses scandales sont sur le sol carrelé greige et elle porte un short rouge et un t-shirt blanc. Ses cheveux bruns ondulés sont rassemblés par un élastique.

Sa mère Edwige s’affaire dans la cuisine. Elle est de corpulence moyenne. Elle est vêtue d'une robe verte unie en coton. Un collier de perles turquoise embellit son décolleté. Elle est aidée par Nathalie, son invitée, voisine et amie. Elles aiment discuter et s’invitent de temps en temps. Professeure de mathématiques, Nathalie est venue donner un cours à Laetitia. Situé en face du canapé, sur un meuble bas laqué noir sont posés des magazines épars. A gauche près de l’entrée, sur une grande table en bois rectangulaire est dressée une nappe blanche sur laquelle sont déposés des couverts, des pichets de vin ainsi que deux corbeilles à pain.

Quelques minutes plus tard, Edwige et son amie sortent de la cuisine et vont rejoindre sur la terrasse située devant l’entrée de la maison, leur mari respectif. Martin, qui est debout près d'une table ronde en fer, sur laquelle sont posés des apéritifs, des boissons alcoolisées et des jus d’orange et d’ananas, finit sa cigarette. Steve, un homme barbu, aux larges épaules termine son verre de scotch. Edwige observe son époux, inquiète. Il lui envoie un sourire crispé. Un nouveau désaccord sur l’éducation de leur fille a eu lieu la veille. Quand elle était plus jeune, Edwige la sermonnait au sujet de l’importance de ses études. Elle a eu tendance à se laisser aller, au désespoir de son père, et ce, encore aujourd’hui. Ce qui compte c’est de passer du temps avec ses amis, de faire la fête. Edwige pense que sa fille est en âge d’être responsable et qu’il n’est plus nécessaire de lui répéter qu’elle doit se mettre au travail. Edwige est une femme un peu laxiste au goût de son mari qui plus autoritaire punirait souvent leur fille de sorties. Il cède car il ne veut pas être considéré comme le bourreau de la famille. Il aime sa fille, mais il lui est difficile de montrer ses sentiments. Il n’en a pas l’habitude.

Les notes sont en baisse et les parents s’interrogent sur les fréquentations amicales de leur adolescente. Quelques jours auparavant, un soir, Martin, affairé dans le jardin près du portail, a vu sa fille sortir avec Paul un ami qu’elle a rencontré quelques semaines plus tôt. Il l’a attendu devant l’entrée avec son scooter, accoutré d’un jeans déchiré, un blouson en cuir noir, un piercing au nez et des tatouages sur son avant-bras droit. Sans lui adresser la parole ni essayer d’en savoir davantage sur ce jeune homme, sur son éducation ou ses fréquentations, Martin a eu une impression négative au sujet de Paul. Les quelques mots qu’il a prononcés à sa fille ont été vains. Elle est tombée amoureuse d’un voyou ! Et sa femme, rien. Pas un mot désobligeant. Elle expérimente ! La colère a pris le dessus. Martin a renchéri sur le comportement inconscient de sa femme qui n’a pas réalisé le danger que leur fille pourrait encourir à poursuivre ses escapades avec ce jeune voyou. Edwige remarque que les sourcils de son mari se froncent. Il gamberge, murmure-t-elle. Il jette le bout de sa cigarette, l’écrase du bout de ses semelles sur le sol. Il se dirige vers sa fille et se retient de pester contre elle quand il l’a voit feuilleter un magazine people au lieu de réviser ses cours. Il garde son sang-froid. Plus tard, il entreprendra une nouvelle conversation au sujet de la baisse de ses notes. Il l’abordera calmement et lui demandera ce qui se passe, si quelque chose la préoccupe, si elle a des soucis…

Sa mère s’approche de Laetitia et l’interpelle.

Ma chérie, nous avons des invités.

Sa fille interrompt quelques secondes une communication :

Attends… deux secondes…

Elle lance à sa mère en grommelant :

Ca va ! J’arrive.

Puis à son interlocuteur :

Paul, faut que j’te laisse… mes voisins sont là… Elle murmure : ils vont me saouler… Je le sens…

Martin ressent comme une étrange sensation, un mauvais pressentiment.

Au cours du repas, les adultes échangent sur différents thèmes : l’environnement, l’actualité, la politique. Laetitia ne participe pas à leur conversation. Qu’est ce que je fous ici, j’aurais préféré être avec Paul. Discuter avec lui de cinéma, de sorties, de projets. Sa tête est penchée sur son assiette sur laquelle est dressée une tranche de rôti d’agneau ainsi que des petites pommes de terre. Un instant, elle la lève pour voir ses parents, qui se sourient.

Martin demande à sa fille :

Ma chérie, passe-moi le sel, s’il te plaît.

Laetitia s’exécute sans un mot.

Merci ma chérie.

Le plat principal terminé, Nathalie, les bras chargés de couverts, passe devant l’armoire et voit dans la vitrine les pierres se ternirent. Elle appelle Edwige qui débarrasse la table pour faire place à la suite du repas :

Tes pierres sont devenues ternes et ont perdu leur couleur ! C’est normal ?

Edwige s’interrompt dans son élan, accoure et constate le fait décrit par son amie.

Oh mon Dieu ! Non !

Son mari en conversation avec Steve, interpelle :

Qu’est-ce que qui se passe, ma chérie ?

C’est Rosy !

Quoi, Rosy ?

Eh bien ! Madame Michel.

Nathalie ajoute :

C’est celle qui tient le magasin à quelques rues d’ici, n’est-ce pas ?

Oui. Quand je l’ai rencontré quelque temps après avoir ouvert sa boutique, elle m’a dit que les pierres appartenaient à un oncle décédé. Il lui en avait donné quelques-unes. Elles ont le pouvoir de prévenir du décès de celui qui les vend. C’est horrible ! J’appelle Rosy !

Arrête ma chérie ! On a déjà parlé de tout ceci. Ce n’est qu’une légende ! Pour l’oncle de Rosy, ce n’est qu’un concours de circonstances.

Edwige compose le numéro de Madame Michel. Elle lui laisse un message lui demandant expressément de la rappeler.

Martin s’excuse : je reviens dans quelques minutes. Il quitte la pièce et monte à l’étage je ne peux plus me taire et il faut que je lui dise, je ne sais pas si j’en aurais le courage, pense-t-il en gravissant les quelques marches qui mènent à un petit espace dans laquelle est aménagé un bureau en bois. Il récupère une clé dans l’un des tiroirs, pour en ouvrir un autre. Son visage qui a rayonné quelques minutes plus tôt devient blême.

Dans le salon, le décès supposé de Rosy bouleverse Edwige. De temps en temps quand elle la croisait dans sa boutique pour lui acheter des pierres et quelques bibelots, ou des livres en lien avec le bien-être, elle a toujours été accueillante et dynamique. Madame Michel lui a vendu des huiles essentielles et a proposé des services tels que des massages. Au cours d’une période difficile dans sa vie de couple, Edwige a eu besoin de sa présence. Elle a vu son mari devenir distant et son comportement changer. Aujourd’hui leur relation semble s’équilibrer. Edwige se sent tout à coup un peu perdue sans elle. Au-delà de l’achat de pierres, elle a tissé des liens d’amitié.

Après le décès de son oncle, Madame Michel a eu le courage d’ouvrir son commerce. Ses parents ne l’ont pas soutenue dans cette entreprise qu’ils ont envisagée comme étant farfelue. Des amis ont été présents et ont pu l’aider à concrétiser son projet.

Edwige s’interroge sur la possibilité de reprendre cette boutique. De temps à autre, sans s’attarder dans la discussion, demeurant vague, elle a dit à son mari qu’elle aimait ce lieu et qu’elle se verrait bien y travailler. Aujourd’hui, elle s’imagine dans ce magasin au milieu des étals de pierres colorées, d’objets hétéroclites. Elle sait qu’elle a de bons contacts avec les autres, mais aucune notion commerciale. Elle s'engagera dans des formations, s’y emploiera et aura toute l’énergie pour faire face aux difficultés. Martin l’a toujours épaulée dans les moments où elle se sentait abattue. Elle se dit que cette fois-ci elle lui en reparlerait plus sérieusement.

Au fait ! Où est-il parti ? Je ne le vois plus, pense Edwige qui vient de la cuisine et apporte le dessert : une charlotte aux fraises, et le dépose sur la table. Nathalie a installé sur celle-ci des petites assiettes et cuillères. Steve est revenu de la terrasse pour déguster le délicieux gâteau.

Dans l’attente de l’arrivée du dessert, Laetitia a allumé le poste de télévision. Les actualités ont annoncé en boucle des faits divers quand elle s’est écriée :

Maman ! Ecoute !

Madame Michel est décédée, annonce un journaliste. Elle a été renversée par une camionnette. Elle a voulu courir pour porter secours à un clochard et n’a pas vu le véhicule. La conductrice en état de choc a été transportée à l’hôpital…

Ce n’est pas possible ! Rosy !

…Madame Michel a tenu une boutique ésotérique et d’après certains témoignages, il paraitrait qu’elle faisait partie d’une communauté nommée Orgus.

Edwige s’écrie :

Quoi ? Une communauté ?

Le journaliste poursuit :

Une polémique s’est instaurée autour de cette femme, certains ont perçu en elle une personne bienveillante. Tandis que d’autres, vulnérables, qui ont cru à ses promesses de richesse et de gloire, se sont vu soutirer de l’argent. Elle serait considérée comme un gourou.

Rosy ? Un gourou ?

Je l’ai croisé quelques fois, mais sans plus, dit Nathalie.

Moi non plus je ne la connais pas, répond Steve.

Moi oui ! s’écrie Martin qui descend les dernières marches et arrive près du téléviseur.

A ces propos, Edwige s’est retournée vers son mari ainsi que sa fille et ses amis.

Quoi ?

Martin ordonne d'un ton ferme :

Laetitia baisse le son.

Elle s’exécute stupéfaite et impatiente d’en savoir davantage. Papa fait partie d’une secte ! pense-t-elle. Le journaliste n’a pas prononcé ce mot, mais pour Laetitia, c’est la même chose. Comment son père, un homme réfléchi, a-t-il pu être manipulé de la sorte ? De plus, par Madame Michel, une amie de sa mère et annoncée comme un gourou !

Martin s’assoit sur une chaise située autour de la grande table et pose un ouvrage sur celle-ci. Sa fille qui s’est empressée de se lever de son canapé et qui a suivi son père comme sa femme et ses amis, s’empare du livre et lit le titre :

La légende d’Orgus ! C’est quoi ça, papa ! Ne me dis pas que tu y crois !

Les yeux brumeux, Martin avoue, honteux.

Moi aussi, jeune, j’ai cru à ces pierres, à toute cette richesse que j’aurais pu obtenir…

Mais papa, pas toi ?

Ne m’interromps pas, ma chérie, s’il te plaît.

Laetitia écoute avec attention ses explications.

J’ai prospecté, creusé, fouillé avec d’autres. J’ai rencontré Rosy, elle a fédéré de nombreuses personnes, leur demandant de l’argent pour financer ces recherches.

Mon chéri ! Comment tu as pu croire à ces dires ?

Je n’ai pas été le seul... et sa boutique… que tu aimes tant…

Oui eh bien !

Maintenant qu’elle est morte !... Elle est à toi.

Qu’est-ce que tu me racontes ?

Quand Rosy a commencé à créer son projet de boutique, je lui ai donné un peu d’argent. A ce moment, l’entreprise de transport où j’ai travaillé a prospéré et j’ai pu économiser pour nous, notre confort.

Quel rapport avec la boutique ? l’interpelle Edwige.

Edwige contient sa joie et essaye de comprendre les dires de son époux et les non-dits vis-à-vis d’elle.

A plusieurs reprises tu m’as dit que tu aimerais bien travailler dans ce magasin.

Oui, certes…

Aujourd’hui c’est possible.

Edwige sans mot pendant quelques secondes semble prise de court par ces propos. Mais pourquoi ne m’a-t-il pas fait part de cette intention ? murmure-t-elle.

J’ai convenu avec Rosy de lui financer la boutique. A son décès, elle serait à toi. Nous avons fait les papiers devant le notaire. Tout est en règle.

Pourquoi tu ne m’en as pas parlé plus tôt ?

Rien de bien concret n’a été envisagé jusqu’au moment où, il y a quelques mois seulement, elle a signé les documents.

Mon Dieu ! Nous pourrions t’accuser de meurtre ! s’exclame Nathalie.

Il la regarde et fermement il lance :

Je ne suis pas un meurtrier ! Comment tu peux penser cela ! Vous avez entendu les actualités. Son décès est dû à un accident.

Edwige regarde désorientée son amie Nathalie.

Laetitia l’interpelle :

Tu as acheté la boutique pour faire plaisir à Maman !

C’est exact ma chérie. Et à toi aussi.

Laetitia hoche des épaules. Cela lui est arrivé qu’elle accompagne sa mère mais pendant ce temps, elle a préféré flâner dans la maison de la presse qui juxtapose la boutique, et feuilleter les magazines people.

Nathalie et Steve s’observent intrigués. Ils n’ont pas eu connaissance de ce fait. Steve qui a confié ses tracas à Martin a pensé être proche de lui. A l’évidence, il s’est trompé sur la notion d’amitié avec Martin. Et il ne comprend pas le lien que Martin a entretenu avec Madame Michel.

******

Un an plus tard, Edwige range des bibelots sur des étagères quand une cloche tinte. Laetitia entre avec un petit carton à la main. Elle le pose sur le comptoir. Edwige l’ouvre et découvre des petites pierres de coloris différents, un peu plus grosses que celles qui sont exposées dans le meuble de son salon.

D’où as-tu eu ces pierres ? Elles sont magnifiques ! Je ne les ai jamais vues.

C’est papa, ce matin, qui a laissé ce colis sur le bureau de ma chambre. J’ai pensé que cela te ferait plaisir de les avoir dans ta boutique.

C’est ton père qui te les a données. Garde-les précieusement.

Regarde, il m’a offert le livre La légende d’Orgus.

Edwige sourit.

Il a aussi remis une lettre pliée dans une enveloppe. Tu peux la lire. Elle nous concerne toutes les deux.

Intriguée, Edwige demande :

Tu l’as lu ?

Oui.

Pourquoi cette lettre ? Qu'est-ce qu’il raconte ?

Lis ! Tu verras !

Edwige la déplie et commence la lecture. Elle s’assoit sur un haut tabouret, situé derrière le comptoir.

Laetitia observe des bijoux : colliers, boucles d’oreilles, bracelets.

Mes amours, j’ai essayé de vous protéger afin que vous soyez heureuses. Voici ce colis et ce précieux livre. Je vous ai menti sur un fait. Orgus, ce Dieu qui a eu le pouvoir de faire jaillir des joyaux a bien existé et seulement une dizaine de personnes en ont trouvé. La plupart d’entre nous n’ont pas fait fortune comme nous avons pu l’espérer. En fait, ces pierres n'ont pas valu grand-chose. Rosy a continué à prospecter. Je n’ai pas pu la dissuader d’arrêter les recherches. Elle en a récolté quelques-unes qui lui ont tout juste permis de démarrer son projet de boutique.

Je suis désolé ma chérie. Je ne t’en ai pas parlé. Elle a été ton amie et je n’ai pas souhaité ternir son image auprès de toi. Dans son magasin elle a été une personne sympathique et conviviale comme tu l’as connue. Pour moi, son comportement a été un paradoxe et j’ai eu du mal à la comprendre. D’un côté, elle est décédée en voulant sauver un clochard ! Et d’un autre côté, dans sa communauté, dont tu ignorais l’existence, elle a abusé de la faiblesse des gens. Elle a été autoritaire envers eux. C'est moi qui lui ai dit de ne pas t'en parler. Je la menaçais sinon de ne plus financer son projet. Surtout, je regrette de ne pas avoir insisté pour lui faire comprendre qu’elle a été trop loin. Elle s’est obstinée, voulait s’enrichir grâce à cette légende, cela jusqu’à l’obsession.

J’ai réussi à en vendre un peu. L’argent m’a permis de rembourser une petite partie du crédit de la maison et le reste se trouve dans ce colis. Je pense que Steve et Nathalie ont peur que je les entraîne dans cette communauté qui d’ailleurs disparaît avec elle. Je n’en ai jamais vraiment fait parti. Ils me croiront peut-être un jour. J’aimerais que vous conserviez ces pierres. Ce matin, je me suis dit que je manquais de courage. Te mentir, vous mentir ! Ce voyage à Prague est le bienvenu. Je me promets de tout vous raconter dès mon retour, dans un mois. A bientôt mes amours. Martin qui vous aime tendrement.

Laetitia a mis autour du cou un collier de petites perles bleues et blanches. Elle s’apprête à l’ôter, quand sa mère l’interpelle :

Ce collier, il te plaît ?

Oui, mais je ne peux pas, je…

Prends-le, je le déduirai de mon compte.

Oh ! Merci maman.

Un mois plus tard, Edwige et Martin, assis sur des chaises blanches, prennent un verre sur la terrasse. Le couple et leurs amis, Nathalie et Steve ne s’invitent désormais qu’occasionnellement. Paul, qui s’est séparé de leur fille, n’est plus au centre de leur discussion. C’est la boutique nommée « Chez Edwige » qui est leur sujet de conversation. Laetitia est allongée dans le canapé un livre à main : La légende d’Orgus. Dans le meuble vitré du salon, la nouvelle collection de pierres étincelle.




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